Calypso Rose, proclamée reine du calypso en 1972, n’a pas volé son titre. Elle est encore maintenant le porte-parole de ce style originaire de Trinité-et-Tobago, jadis réservé uniquement à la gent masculine. Tout un emblème donc, qui fait de Calypso Rose une figure contemporaine de la lutte pour le droit des femmes.
Dans son nouvel album So Calypso!, la diva de Tobago a décidé de revenir sur les références qui ont bercé sa carrière musicale et sa vie. Nat King Cole, Aretha Franklin, The Melodians, Angélique Kidjo : tous, américains, jamaïcains, béninoise, ont nourri la ligne de conduite que la doyenne du calypso respecte depuis ses débuts dans les années 1960 : le mariage de la musique noire et combat social.
De Nat King Cole, Calypso Rose reprend ainsi « Calypso Blues », composé en 1949 par le pianiste crooner, militant contre le racisme et la ségrégation. Né à Montgome- ry en Alabama en 1919, Nat King Cole avait très vite embrassé la cause de tous les Américains venus d’ailleurs : africains, caribéens, hispaniques... Avec Calypso blues (paroles de Don George, comparse de Duke Ellington), il remet en cause le modèle américain, vantant les mérites du jus de papaye et du riz aux crevettes au détriment des hot-dogs, la douceur de la vie sans dollar et les atouts de la femme trinidadienne préférée aux blondes glaciales.
Nat King Cole avait présenté sa chanson dans une mémorable séquence de télé- vision, « The Rythm & Blues Revue » enregistré à l’Apollo Theater en 1955. Calyp- so Rose s’en est emparée avec humour, ajoutant une touche de reggae et de soul, apparaissant grimée en bonhomme, bretelles et chapeau de paille, dans un clip. La diva de 78 ans, 22 albums au compteur, s’amuse avec brio de la nostalgie, du « blues » caribéen, du bien vivre et d’une lutte qui continue.